T243 – a. L’efficacité et les avantages du système automatisé CODIS

a. L’efficacité et les avantages du système automatisé CODIS
i. Un outil d’enquête et d’entraide à la poursuite pénale
  • Le processus de fichage débute par l’interpellation d’une personne, le prélèvement de son matériel génétique et l’analyse génétique subséquente[1]. Le profil d’ADN obtenu est intégré provisoirement à la base de données CODIS pour être confronté aux profils stockés et éventuellement à la trace indiciale d’origine inconnue. L’intégration de la fiche informatisée ne devient définitive qu’en cas de condamnation.
  • L’efficience du fichier CODIS est proportionnelle au nombre de fiches incorporées, plus le nombre de profils enregistrés est important plus les chances d’identification augmentent. La disponibilité des fiches d’ADN a pour conséquence un déplacement de l’analyse génétique en début d’enquête pour cibler un potentiel suspect[2]. Au début de l’utilisation du matériel génétique comme moyen identificatoire, le prélèvement et l’analyse de l’ADN n’avaient lieu qu’en fin d’enquête pour conforter les soupçons sur le suspect. Aujourd’hui, grâce au fichier informatisé qui facilite les comparaisons, le profil d’ADN est utilisé pour désigner un suspect de manière efficace et relativement fiable[3].
  • Au-delà de la facilité d’obtenir une information, la comparaison informatisée s’effectue en peu de temps permettant l’accélération des procédures.
  • La rapidité de comparaison et l’augmentation du nombre de profils stockés dans CODIS n’est pas sans influence sur l’économie du procès. Premièrement, le temps gagné à éviter des interrogatoires fastidieux lorsque l’individu nie tout lien avec la victime, le lieu de l’infraction ou un objet s’y référant permet au corps de police de se focaliser sur une autre affaire ou une autre tâche.
  • Deuxièmement, une seule analyse génétique peut servir à établir un lien entre plusieurs affaires – même séparées dans le temps ou dans l’espace – impliquant une dispense pour les enquêteurs d’investigations classiques[4]. Grâce à la base de données CODIS, il suffit qu’un malfaiteur soit arrêté et fasse l’objet d’un prélèvement pour réaliser qu’il est à la source d’une série de traces biologiques déjà découvertes. Dans ces circonstances, la fonction identificatrice de l’ADN est pleinement remplie et conforte les milieux policiers dans leurs démarches[5].
  • Enfin, la comparaison individu/individu permet de déceler les substitutions éventuelles d’identités.
  • Le taux d’élucidation de crimes ou délits, extensivement le nombre de poursuites et de condamnations, ont sensiblement augmenté grâce à CODIS[6]. En augmentant les chances d’identification des criminels et en assurant par là-même une meilleure sécurité publique, la base de données CODIS a également un effet dissuasif. Les possibilités accrues de hit grâce au nombre de fiches enregistrées s’accompagnent d’une crainte des auteurs d’actes délictuels de se voir systématiquement identifier entraînant une baisse de la commission des crimes et délits.

ii. L’atteinte aux libertés fondamentales partiellement amoindrie
  • Nous avons précédemment constaté que le prélèvement du matériel génétique et l’intégration du profil d’ADN atteignaient de manière plus ou moins légère à certaines libertés fondamentales[7]. Nonobstant ces atteintes, il est également possible d’affirmer que la création de la base de données CODIS et son utilisation croissante favorisent dans certaines circonstances une diminution des atteintes aux droits fondamentaux.
a) La limitation possible des enquêtes de grandes envergures
  • La possibilité offerte par CODIS de répertorier un grand nombre de profils d’ADN de criminels permettant d’identifier plus aisément l’auteur à l’origine d’une trace influe sur la nécessité d’effectuer des enquêtes de grandes envergures[8]. Nous avons déjà exposé que le nombre de profils est interdépendant à la réussite de l’analyse de comparaison. Dès lors, l’identification étant plus aisée, l’obtention d’un échantillonnage important peut se révéler désuet.
  • Prenons un exemple: une trace est découverte sur les lieux d’un crime dont l’accès est sécurisé, la police n’a aucun suspect, leur soupçon se porte uniquement sur les vingt employés de sexe masculin habilités à pénétrer dans ledit lieu; grâce à la base de données, il est possible qu’une comparaison entre la trace et les profils d’ADN s’avère positive. Ainsi, il est non seulement possible de limiter les coûts – économie du matériel de prélèvement et d’analyse d’échantillons –, le temps nécessaire aux experts et surtout les atteintes à la liberté personnelle des individus devant être soumis au prélèvement. En effet, l’identification fournissant possiblement un résultat grâce aux profils déjà répertoriés, il n’est pas nécessaire d’effectuer un frottis de la muqueuse jugale ou un prélèvement sanguin sur toute une série d’individus, prélèvement qui crée une atteinte à la liberté personnelle, plus spécifiquement corporelle, de toutes les personnes concernées.
b) Les avantages de l’anonymisation
  • Le deuxième amoindrissement d’une atteinte à un droit fondamental est celui découlant de la technique même de stockage.
  • Grâce à l’informatique, il est possible de répertorier de manière anonyme les profils – et non pas le code génétique dans son entier – permettant l’identification de l’auteur sans prendre connaissance de ses caractéristiques personnelles, outre le sexe, et de lier les données personnelles avec le profil anonymisé qu’en cas de besoin. De ce fait, le système CODIS est moins invasif que le casier judiciaire qui contient les antécédents et les données personnelles de l’intéressé.
  • Au surplus, le rapprochement des données avec le profil d’ADN ne s’effectuent pas par l’organe d’enquête, mais par un service de la Fedpol ce qui limite fortement l’accès aux données personnelles, extensivement diminue l’atteinte à l’autodétermination informationnelle.
c) La limitation des ingérences à la sphère privée des individus innocents
  • Les défenseurs de la protection de la sphère privée peuvent saluer la base de données CODIS.
  • En effet, la première étape d’enquête sert à découvrir un suspect. Si elle est réalisée correctement et à l’aide d’un profilage ADN, il est possible de ne pas soupçonner une personne clairement innocente limitant les interrogatoires, les questions indiscrètes et la possible mise au pilori d’un innocent par ses proches[9].
[1] Supra Partie II, Chapitre 2, II, A, 4, n° 827 ss.

[2] Coquoz, Comte, Hall, Hicks, Taroni, p. 421; CR-CPP-Rohmer, art. 255 N 5.

[3] Coquoz, p. 173; Coquoz, Comte, Hall, Hicks, Taroni, p. 421; Girod, Margot, Ribaux, Walsh, p. 135.

[4] Ancel, p. 144; Girod, Ribaux, Margot, Walsh, p. 136.

[5] Girod, Ribaux, Margot, Walsh, p. 136.

[6] Girod, Margot, Ribaux, Walsh, p. 145-146; Killias, Haas, Taroni, Margot, p. 305.

[7] Supra Partie II, Chapitre 2, II, B, 1, a, n° 845 ss; Infra Partie II, Chapitre 2, II, C, 2, c, n° 1060.

[8] Killias, Haas, Taroni, Margot, p. 304.

[9] Coquoz, p. 173-174.

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