- L’expert joue un rôle central en procédure. Il est un acteur indispensable dans la recherche de la vérité. Qu’il s’agisse d’une demande du ministère public ou des tribunaux (art. 182 ss CPP), l’appel à un ou plusieurs spécialistes chargés d’effectuer une expertise judiciaire est licite pour élucider une problématique liée au manque de connaissances des juristes. Le recours à un expert est une des caractéristiques principales de la phase dite scientifique du système de preuve morale[1].
- Un expert peut intervenir dans de nombreux domaines, notamment lors de la réalisation d’un projet législatif, comme contrôleur pour déterminer l’état de fonctionnement d’un véhicule, pour appréhender la capacité de discernement et/ou la responsabilité d’un individu, etc. Nous ne traitons toutefois que de l’expert au sein de la procédure pénale qui peut intervenir dans le domaine médical, biologique, toxicologique, des sciences forensiques ou informatiques.
- En procédure, l’expertise est un procédé permettant de découvrir et d’utiliser certains indices ou certaines preuves grâce aux connaissances scientifiques ou techniques particulières[2]. Cette définition englobe l’expertise judiciaire correspondant à l’exécution d’un mandat du juge ou du ministère public et l’expertise privée lorsque la mission est accomplie sous la direction d’une partie au procès[3].
- Dans le cadre de l’administration des preuves en procédure pénale, il s’agit de distinguer ces deux types d’expertise et de définir plus précisément l’expertise judiciaire.
- Etant une simple allégation d’une partie[4], l’expertise privée est considérée comme un moyen de preuve irrégulier qui n’est pas expressément prévu par le Code de procédure pénale. L’expertise privée n’est pas un moyen d’instruction, elle est exécutée en dehors de la procédure et aux frais de la partie mandante lorsqu’elle désire démontrer que l’expert judiciaire est dans la méprise et la défavorise de manière erronée.
- L’expertise judiciaire (art. 182 ss CPP) a juridiquement la valeur d’une preuve ordinaire[5]. Elle est définie comme une mesure d’instruction par laquelle le juge ou le ministère public conscient de la complexité de l’affaire confie à un ou plusieurs spécialistes – ayant des compétences scientifiques ou techniques – le soin de se prononcer sur des questions de fait ou d’apporter un avis compétent[6]. Etant une mesure d’instruction, l’expertise judiciaire fait partie intégrante du droit de la procédure pénale.
- La distinction apportée entre expertise privée et judiciaire n’est pas anodine. N’étant pas considérée comme un moyen de preuve, mais comme une simple déclaration faite par une partie au procès, l’expertise privée n’est que peu pertinente dans le contexte probatoire. En revanche, l’expertise judiciaire joue un rôle lors de l’appréciation des preuves par le juge. Nous limitons l’étude à cette mesure d’instruction. L’exégèse de l’expertise doit permettre de déceler les lacunes, les avantages, les inconvénients et la force probante d’un tel mode d’interprétation.
[1] Supra Partie I, Chapitre 1, II, A, 3, b, n° 66-67. [2] Bühler, p. 567; Donatsch, Cavegn, RPS 2008, p. 171; Merle, Vitu, T. II, p. 258; Ruckstuhl, Dittmann, Arnold, p. 172-173. [3] CPP-Commentario-Galliani, Marcellini, art. 182-191 N 4; CR-CPP-Vuille, art. 182 N 18 ss; Donatsch, Jusletter, n° 8; Perrier Depeursinge, art. 182, p. 230-231; Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, p. 380-381; Ruckstuhl, Dittmann, Arnold, p. 173. [4] ATF 97 I 320, 325; ATF 127 I 73, 82; ATF 132 III 83, 87-88 = JdT 2006 I 334, 336-337 = SJ 2006 I 233, 234; ATF 135 III 670, 677; TF 6B_215/2013 du 27 janvier 2014, c. 1.2; BSK-StPO-Heer, art. 182 N 10; Donatsch, Jusletter, n° 16; Donatsch, Kriminalistik 2007, p. 567; Moreillon, Parein-Reymond, Intro art. 182 ss N 4. [5] BSK-StPO-Heer, art. 183 N 1; Goldschmid, Maurer, Sollberger, Textausgabe-Sollberger, p. 174; Zwiehoff, p. 16. [6] Maurer, p. 231; Perrier Depeursinge, art. 182, p. 231; Oberholzer, Strafprozessrechts, p. 293 ss; Riedo, Fiolka, Niggli, p. 209; Schmid, Handbuch, p. 396 ss.