T177 – 3. L’utilisation du système AFIS et ses limites

a. Un outil efficace et précieux pour les dactyloscopes et la justice
  • Dans le domaine des empreintes papillaires, le système AFIS constitue la base de données regroupant les profils dermatoglyphes d’individus et les traces inconnues. La collection des fiches enregistrées sert ainsi à mettre en place un matériel de référence permettant l’évaluation des traces prélevées pour déterminer l’identité d’une personne.
  • Au sein de cette base, les algorithmes de recherches automatiques permettent de comparer une trace aux empreintes intégrées dans AFIS[1], et inversement, de comparer une empreinte connue par la base de données pour retrouver un potentiel lien avec une trace inconnue.
  • Le nombre d’identifications positives est intimement lié à la croissance constante des données enregistrées. Il est indiscutable que plus il existe de profils déca- ou monodactylaires, plus les chances d’obtenir un hit s’accroissent.
  • L’augmentation des profils ou des traces répertoriées offre également une base AFIS plus représentative des variabilités entre les différentes appositions des minuties.
  • L’intra- (même doigt) et l’intervariabilité – se définissant comme le résultat statistique au vu des différentes appositions des minuties – sont à la base de toutes approches probabilistes. Actuellement, l’approche déterministe en vigueur en Suisse ne s’appuie jamais sur le rapport de vraisemblance que peut offrir un système informatisé. Cependant, selon notre position, l’approche probabiliste est plus viable pour le juriste qui doit apprécier la preuve dactyloscopique. C’est pourquoi, il est important de souligner l’avantage de l’exploitation des scores issus du système AFIS. La collection de fiches et l’automatisation des bases de données offrent en effet la possibilité de déterminer le plus justement possible les fréquences et probabilité d’existence des points caractéristiques. Ainsi, la fréquence connue d’un type de minutie ou de la concordance avec d’autres points caractéristiques renforce la valeur identificatoire, ou au contraire, s’il n’existe que peu de minuties analysables et qu’elles sont fréquemment examinées dans cette configuration, la diminue.

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T174 – 2. Une nouvelle perspective: la nature probabiliste de l’identification

a. La démonstration relative de la réalité par l’approche déterministe
  • La critique portée à la nature déterministe, nous mène à considérer la nature probabiliste du processus d’identification papillaire.
  • Les résultats issus de l’analyse identificatoire se réalisant en aval de la commission de l’infraction et ne permettant pas d’observer directement les circonstances de l’acte délictuel, l’empreinte papillaire déposée n’est pas la fidèle représentante de la réalité et des faits.
  • Premièrement, les dessins papillaires déposés ne sont pas l’exacte image de l’empreinte du doigt.
  • Deuxièmement, la présence d’une empreinte ne signifie pas que l’individu auteur du dépôt est l’auteur de l’infraction, ce qui crée des imprécisions/incertitudes dans le résultat identificatoire en science forensique[1].
  • Bénéficiant d’un poids important en procédure pénale, il est essentiel que les conclusions dactyloscopiques reflètent l’état naturel des événements et de l’établissement des faits pour être les plus représentatives possible de la réalité. Cette démarche implique qu’un résultat faisant suite à une analyse d’une empreinte papillaire ne peut pas être apporté comme une identification formelle, mais une présomption.
  • Le processus d’identification n’est pas dichotomique, il s’agit plutôt de continuum de probabilités prenant en considération la perte d’informations liée au transfert.

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T163 – b. Les problématiques liées à l’exploitation et à l’administration de la preuve dactyloscopique

i. L’absence de standard minimum
  • Alors même qu’une analyse dactyloscopique ne repose pas sur un minimum de similitudes, les dactylotechniciens suisses n’ont pas le droit de fournir un avis qualifié pour éviter tout risque de confusion ou d’incompréhension dans l’esprit du juge. Ces deux pratiques sont contradictoires.
  • En réfutant l’avis qualifié par manque d’univocité et en acceptant que l’expert ne prouve pas numériquement les concordances, la certitude est donnée par l’univocité, mais n’est pas démontrable mathématiquement ou objectivement.
  • Pour garantir un niveau de qualité, d’infaillibilité et d’objectivité supplémentaire de la preuve dactyloscopique, il nous semble – en accord avec le Professeur Champod[1] – obligatoire de fixer un nombre de similitudes à mettre en évidence ou tout du moins d’instaurer un intervalle et de permettre l’annonce du résultat en terme probatoire, ce qui permettrait d’assurer un minimum de certitude.
  • Certes, l’absence d’un standard numérique est en partie avantageuse augmentant les possibilités d’individualisation[2], mais ce manque de limite cause également des complications, voire des désagréments.
  • Depuis 2007, pour obtenir un résultat identificatoire indiscuté, l’expert doit être suffisamment expérimenté[3]. Consécutivement, la formation des experts doit être importante et suffisante. La surestimation de l’expérience de l’homme de l’art, voire une formation lacunaire ou critiquable, peuvent influencer les conclusions identificatoires et créer un risque quant à leur valeur, sans qu’il soit possible de contrebalancer ou confirmer à l’aide de la correspondance numérique le résultat.

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T159 – C. La discussion sur la preuve dactyloscopique

  • Une enquête américaine[1] a conclu que 85% des 978 jurés auditionnés considèrent la preuve dactyloscopique comme la méthode la plus fiable d’identification.
  • L’acceptation dans le monde judiciaire suisse n’a pas fait l’objet d’une enquête précise, mais il paraît vraisemblable que les empreintes digitales ne sont pas sans influence au cours des procès.
  • Cependant, la fragilité de la science et de la pratique à la base de l’identification – le risque d’erreur, les inconvénients liés aux résultats identificatoires, l’usage d’un traitement automatisé ou l’atteinte aux droits fondamentaux – ne sont pas à négliger, tout comme les nombreux avantages de cette méthode identificatoire
[1] Becue, Champod, Egli, Moret, p. 4; Epstein Robert, Fingerprints meet Daubert: The Myth of Fingerprint "Science" is revealed, in California Law Review 75 (2002), p. 605-657, 605.

t159 – 1. L’évaluation de la preuve dactyloscopique dans l’ordre judiciaire suisse

a. Le potentiel de la preuve dactyloscopique
i. Une preuve hybride
  • La preuve dactyloscopique est incontestablement une preuve hybride. Elle se compose d’une empreinte digitale, soit d’une trace indiciale matérielle qui est détectée et constatée directement sur les lieux de l’infraction ou sur un objet s’y trouvant, ainsi que d’une inférence[1].
  • Conséquemment, le juge ne saisit pas directement la portée de l’indice en présence. Un raisonnement/une interprétation est nécessaire. Cet aspect subjectif peut rendre l’empreinte papillaire plus facilement contestable qu’une preuve purement matérielle, c’est pourquoi il est contrebalancé par l’objectivité de la science et de l’expert.
  • L’expert n’étant pas partie au procès et ne déclarant pas ce qu’il a vu ou entendu, mais uniquement ce qui résulte du processus identificatoire scientifique, ses conclusions sont plus fiables que celles d’un témoin; d’autant que le scientifique agit conformément à la déontologie en faisant honneur à sa profession et en agissant en toute impartialité[2]. En cas de doute quant à l’objectivité de l’expertise, il est toujours possible d’interroger le professionnel ou de recourir à une contre-expertise pour s’assurer de la bonne application des principes scientifiques.
  • Mi-subjectives, mi-objectives, les traces papillaires ont pour les criminalistes le pouvoir de faire avancer l’enquête. Sans cette science, bon nombre d’affaires criminelles n’auraient pas été résolues à défaut de connaître l’identité du potentiel coupable.
  • L’atout majeur de la preuve dactyloscopique est donc son caractère scientifique qui permet de prouver, d’argumenter ou de motiver les résultats identificatoires, extensivement d’accorder un certain poids aux dires de l’expert. La dactyloscopie procure une certitude d’ordre physique[3] préférable aux présomptions morales qui peuvent entacher les preuves testimoniales.

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