T407 – b. L’approximation de la localisation

  • L’exploitation des données de positionnement ne s’avère utile à l’autorité pénale que si elles sont de qualité ou, tout du moins, s’il est possible de quantifier l’approximation, voire le risque d’erreur. A cette fin, il faut distinguer la qualité des données en fonction de la méthode de localisation employée.
i. Les données issues des systèmes de navigation par satellite
  • Le principe du GPS se base sur la multilatération, soit la réception du signal émis par trois satellites afin de définir une coordonnée en deux dimensions à l’aide des données temps et distances du signal émis. Une erreur dans une information nécessaire au calcul des coordonnées faussent par conséquent la localisation du récepteur GPS. Les principaux écarts de positionnement tiennent au retard des signaux dans leur déplacement, à la précision des horloges des satellites, aux perturbations extérieures et aux obstacles réfléchissants[1]. Des corrections peuvent être apportées pour réduire ces erreurs: modèles de l’ionosphère, conception spéciale des signaux, etc. En outre, il est toujours possible de quantifier l’approximation du positionnement et d’effectuer manuellement un correctif.

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T404 – 2. Les faiblesses et problématiques des preuves issues des systèmes GPS et GSM

a. L’interprétation nécessaire des résultats de positionnement
  • Les méthodes de localisation automatisée visent à réduire le nombre de contrôles sur le terrain et des ressources nécessaires aux filatures. Néanmoins, il ne faut pas en déduire que les résultats obtenus sont clairs, précis et ne nécessitent aucune interprétation ou que le travail d’enquête est inutile.
  • La localisation d’un individu au moyen des systèmes GPS ou GSM ne permet pas de confondre formellement le suspect, ni d’exclure sa culpabilité.
i. En cas de correspondance positive
  • Une correspondance positive n’indique pas nécessairement que le suspect ou l’accusé était présent au moment de l’infraction, mais uniquement que son véhicule muni d’un GPS, qu’un autre appareil de navigation par satellite ou que son téléphone mobile était à proximité de la scène de crime[1].
  • Il n’est d’emblée pas exclu que le propriétaire du véhicule ou de l’objet permettant d’obtenir les données de positionnement ne soit pas à proximité de son bien. Il peut en effet avoir prêté sa voiture ou son téléphone, avoir été victime d’un vol ou d’un emprunt non autorisé, ou avoir perdu son appareil mobile.
  • En outre, dans l’hypothèse où il est possible de déterminer la présence sur les lieux du propriétaire du bien, de son emprunteur ou du voleur, il n’est pas impossible que l’auteur de l’infraction soit un tiers présent au même lieu et au même moment sans qu’il soit lié à la personne surveillée.
ii. En cas de correspondance négative
  • Une correspondance négative ne signifie pas que le propriétaire de l’appareil GPS, du véhicule ou du téléphone mobile ne se trouvait pas sur les lieux d’une infraction.
  • Il existe parfois des « faux-négatifs ». Le suspect ou l’accusé a effectivement commis un acte délictuel sans que le lien géographique ne soit mis en évidence à l’aide des systèmes de localisation simplement parce que le téléphone portable ou le véhicule munis d’un appareillage GPS n’a pas été utilisé, qu’il était hors-zone de couverture, etc.
  • En outre, lorsque l’appareil GPS localisé est celui d’une voiture, l’autorité pénale doit encore prendre en considération les déplacements entre ledit véhicule et la scène de crime. Le choix de la distance va dépendre étroitement du trajet que l’auteur va réaliser pour commettre son infraction.
  • Dans l’hypothèse où le véhicule est utilisé pour réaliser l’acte délictuel, la distance avec la scène de crime n’a pas lieu d’être considérée.
  • En revanche, si l’auteur-récidiviste a pour habitude d’effectuer un trajet à pied d’une certaine longueur pour être plus difficilement repéré, la prise en compte d’une distance de quelques kilomètres – maximum 5 kilomètres – n’est pas déraisonnable.
  • Ce dernier exemple peut être appliqué par analogie quant à la réception du signal émis par un téléphone mobile. Il n’est pas exclu que l’auteur se serve de son portable – par exemple, pour organiser une livraison de stupéfiant – et se déplace sur les lieux de l’infraction sans être muni dudit téléphone ce qui empêche de le localiser. Une distance également de quelques kilomètres peut être prise en compte pour considérer les trajets de l’auteur sans quoi les risques d’obtenir un faux positif sont accrus.
iii. Le travail d’enquête
  • Les données de positionnement n’étant pas suffisantes par elles-mêmes, il ne s’agit que d’un indice. Pour s’assurer de ce qu’elles démontrent réellement, la localisation doit faire l’objet d’une enquête approfondie et être intégrée dans un faisceau de preuves.
  • La géolocalisation permet uniquement de cibler les vérifications usuelles d’enquête sur un ou plusieurs individus. La phase d’enquête ne se résume donc pas à une simple formalité. Lorsqu’une coordonnée géographique est fournie aux autorités pénales, une procédure complémentaire doit être réalisée.
  • La première étape s’effectue par comparaison. L’utilité d’une donnée de positionnement en procédure pénale n’existe que si elle est couplée avec une infraction. Il est donc nécessaire de vérifier que la position géographique et le moment du signal soient similaires au lieu et au moment du déroulement de l’acte délictuel.
  • La deuxième étape est l’examen des informations obtenues. Si une corrélation entre les données de positionnement et la scène de crime a pu être déterminée, l’autorité pénale doit se demander qui était l’utilisateur du véhicule, du téléphone mobile ou de tout autre appareil GPS ou GSM. Une fois déterminé, il faut encore vérifier que la personne identifiée n’avait pas une raison particulière de se trouver dans la zone à proximité de l’infraction[2].
  • La troisième étape est le couplement entre les informations issues de la localisation et les autres moyens de preuves alléguant les faits reprochés. Ce n’est que dans l’hypothèse où un faisceau de preuves existe que la donnée de positionnement trouve son intérêt en justice.
  • En tant que telle, prise isolément, la donnée de positionnement démontre uniquement qu’un objet mobile, soit déplaçable avec facilité, s’est trouvé à proximité du lieu de commission d’un acte délictuel. Une simple coordonnée géographique ne démontre donc que peu – voire pas – d’éléments de fait concrets de l’affaire. Par conséquent, seule, elle n’a quasiment pas de valeur probatoire.
  • Même une localisation en temps réel a sa marge d’interprétation. En effet, elle permet de lier avec certitude un individu et un lieu, mais l’identification formelle de cette personne comme auteur d’une infraction n’est pas prouvée. Il est donc également nécessaire de recourir à d’autres moyens probatoires.
[1] Birrer, Terrettaz-Zufferey, p. 498; Cartier, p. 222; Cornu, p. 246 et 248.

[2] Birrer, Terrettaz-Zufferey, p. 498.