T454 – d) Les données recueillies

  1. Les données informatiques utiles
  • Nous l’avons énoncé[1], la perquisition vise à acquérir des preuves documentaires afin d’élucider les faits, et/ou d’identifier l’auteur et/ou les participants.
  • Ainsi, certains documents et enregistrements sont utiles à l’enquête et peuvent s’avérer être des moyens de preuves pertinents. Tous ces éléments, étant susceptibles de servir à la manifestation de la vérité au cours du procès pénal, sont mis en sûreté afin de garantir leur protection et leur conservation (art. 263 ss CPP).
  1. La mise sous scellé
  • Si un titulaire de documents ou d’enregistrements s’oppose à la perquisition et au séquestre au motif qu’il est couvert par un secret privé ou professionnel ou pour d’autres motifs – informations non pertinentes à l’affaire en cause – et que l’autorité persiste à vouloir saisir les documents et enregistrements, le détenteur et/ou l’ayant droit peuvent demander la mise sous scellé (art. 248 al. 1 CPP). Ce droit appartient au prévenu ou aux tiers et permet de s’opposer tant à la perquisition qu’à un ordre de production[2].
  • Pour obtenir la mise sous scellé, le détenteur doit immédiatement ou l’ayant droit dès qu’il a connaissance de la perquisition et du séquestre – avant le commencement de l’évaluation des informations – en formuler la demande et rendre vraisemblable que son droit de refuser de témoigner, de déposer ou d’autres motifs existent[3].

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T452 – c) L’exécution de la perquisition

  • L’exécution de la perquisition des documents et enregistrements est prévue aux art. 242 et 247 CPP.
  1. Les dispositions générales
  • L’autorité ou la personne chargée d’exécuter la mesure – la police, le ministère public, le tribunal de première instance ou la juridiction d’appel (art. 12, 13 let. b et 2, 198 al. 2 CPP cum 242 al. 1 CPP) – doit mettre en œuvre tous les moyens aptes et nécessaires à la sauvegarde du but d’intérêt public que représente la perquisition, soit notamment de permettre le séquestre des moyens de preuves (art. 242 al. 1 CPP).
  • Ainsi, lorsque l’autorité ou la personne chargée d’exécuter le mandat de perquisition agit, elle doit respecter le principe de proportionnalité, étant précisé que ce principe est explicitement prévu à l’art. 200 CPP qui dispose que le recours à la force – in casu à la perquisition de documents et d’enregistrements – ne peut être utilisé qu’en dernier recours.
  • En outre, l’autorité compétente pour exécuter la mesure de contrainte doit communiquer le mandat à la personne directement touchée par la perquisition des documents lorsqu’elle est ordonnée par écrit (art. 199 CPP)[1]. Si les informations obtenues par la perquisition concernent un tiers, une copie du mandat ne doit donc pas lui être remise[2]. L’autorité compétente doit également fournir une copie d’un éventuel procès-verbal d’exécution.
  1. Les dispositions spéciales
  • La perquisition des documents et des enregistrements doit être exécutée en respectant au maximum la confidentialité[3], notamment en respectant le secret professionnel et en évitant que des informations non nécessaires à l’affaire soient recueillies[4]. C’est pourquoi le détenteur effectif des documents et enregistrements a le droit de se déterminer préalablement sur leur contenu, et ainsi éventuellement demander que leur lecture ne soit pas réalisée (art. 247 al. 1 CPP)[5].

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T450 – b) L’ordre de perquisition

  1. Compétence, forme et contenu de l’ordre de perquisition
  • L’art. 198 al. 1 CPP détermine la compétence pour ordonner une mesure de contrainte (art. 196 CPP), notamment la perquisition de documents ou d’enregistrements contenus sur un support informatique.
  • En règle générale, le ministère public après ouverture d’une instruction (art. 198 al. 1 let. a CPP cum 309 al. 1 let. b CPP) et, après l’inculpation, le tribunal ou la direction de la procédure en cas d’urgence (art. 198 al. 1 let. b CPP cum 328 CPP) sont habilités à ordonner la mesure[1]. Pour ce faire, ils doivent délivrer un mandat écrit indiquant les documents à examiner, le but de la mesure et les autorités ou personnes chargées de l’exécuter (art. 241 al. 2 CPP cum 80 CPP). Toutefois, en cas d’urgence, un mandat oral – suivi d’une confirmation écrite – peut être délivré (art. 241 al. 1 CPP).
  • En cas de péril en la demeure – par exemple, si le but visé par la perquisition est compromis dans l’intervalle –, la police est autorisée à exécuter la perquisition sans mandat en informant toutefois sans délai l’autorité pénale compétente – ministère public ou tribunal – (art. 198 al. 1 let. c cum 213 al. 2 et/ou 241 al. 3 CPP)[2].
  1. Les conditions à respecter pour la perquisition des documents et enregistrements
  • Pour assurer la protection des informations sensibles ou secrètes, la lettre de l’art. 246 CPP subordonne la perquisition des documents et enregistrements à l’exigence que les informations contenues dans les documents ou les enregistrements puissent faire l’objet d’un séquestre.
  • En vertu de l’art. 263 al. 1 let. a CPP, cette exigence est réalisée si les documents et enregistrements sont utilisés par la suite comme moyen de preuve. L’utilité doit s’apprécier sur la base d’indices concrets, en gardant à l’esprit qu’une utilité potentielle est suffisante[3]. Dès lors, l’autorité pénale ne peut pas effectuer une perquisition à des fins exploratoires[4], elle doit avoir suffisamment d’indices lui faisant penser que les fichiers informatiques – notamment – sont utiles à l’administration de la justice, sans quoi les preuves sont irrecevables et inexploitables[5].
  • Relevons encore que selon l’art. 264 CPP, les documents et enregistrements ne peuvent être séquestrés lorsqu’ils concernent la sphère privée du prévenu ou de tiers, ou qu’ils contiennent des secrets protégés par la loi.
  • Ainsi, la correspondance entre le prévenu et son défenseur (art. 264 al. 1 let. a CPP), les documents personnels et la correspondance du prévenu si l’intérêt à la protection de la personnalité prime l’intérêt de la poursuite pénale (art. 264 al. 1 let. b CPP), les objets, notamment les documents et la correspondance qui proviennent de relations établies entre le prévenu et une personne ayant le droit de refuser de témoigner en vertu des art. 170 à 173 CPP et qui n’a pas le statut de prévenu[6], n’a pas agi au préjudice de son client, en connivence avec lui ou au détriment d’un tiers[7] (art. 264 al. 1 let. c CPP) doivent être mis sous scellé suite à la demande de la personne qui entend s’opposer à la perquisition et au séquestre (art. 248 al. 1 et 264 al. 3 CPP)[8].
[1] ATF 139 IV 128, 133 = JdT 2014 IV 15, 18.

[2] ATF 139 IV 128, 133-134 = JdT 2014 IV 15, 19-20; Message, CPP, p. 1219; Schmid, Handbuch, p. 457.

[3] ATF 119 IV 175, 178 = JdT 1995 IV 125; ATF 122 II 367, 371 = JdT 1998 IV 127, 127-128; ATF 130 II 193, 197-198 = JdT 2005 IV 309, 313; ATF 134 II 318, 327; ATF 136 IV 82, 85-86; BSK-StPO-Thormann, Brechbühl, art. 246 N 7; CR-CPP-Chirazi, art. 246 N 5; Donatsch, Schwarzenegger, Wohlers, p. 224; Oberholzer, Strafprozessrechts, p. 401.

[4] ATF 103 Ia 206, 216-217 = JdT 1979 IV 16, 22-23; ATF 126 II 495, 505.

[5] ATF 125 II 65, 73; ATF 129 IV 141, 145.

[6] ATF 102 Ia 516, 519-520 = JdT 1978 IV 128; ATF 102 IV 210, 214 = JdT 1977 IV 128; ATF 117 Ia 341, 350; ATF 125 I 46, 50 = JdT 2000 IV 17, 21; ATF 126 II 495, 505; ATF 127 II 151, 154; ATF 130 II 193, 195-196 = JdT 2005 IV 309, 311-312.

[7] ATF 102 IV 210, 214 = JdT 1977 IV 128.

[8] Infra Partie II, Chapitre 3, III, A, 3, c, iii, d), 2, n° 2083-2084.

T450 – a) Le champ d’application

  • La perquisition de documents et d’enregistrements permet de lire ou de regarder un fichier afin d’en connaître le contenu, de déterminer si les données sont susceptibles d’être utilisées comme preuve et, le cas échéant, si elles doivent être consignées au dossier[1]; en d’autres termes, de mettre en sureté des moyens de preuves (art. 196 let. a CPP).
  • Ce type de perquisition vise spécifiquement les documents physiques, les enregistrements audio, vidéo, les supports informatiques ainsi que les installations destinées au traitement et à l’enregistrement d’informations (art. 246 CPP)[2].
  • Concernant les données informatiques, la disposition ne limite ni la nature des données, ni le moyen de stockage. Ainsi, tout fichier – écrit, image, audio, vidéo, etc. – enregistré sur tout type de support informatique – disque dur interne, disque dur externe, clé USB, disquette, CD-ROM, mémoire vive interne, etc. – est susceptible d’être perquisitionné[3].
[1] ATF 109 IV 153, 154 = JdT 1984 IV 123; ATF 130 II 302, 304.

[2] ATF 139 IV 128, 132-133 = JdT 2014 IV 15, 18-19; Eicker, Huber, p. 171; Moreillon, Parein-Reymond, art. 246 N 3; Riedo, Fiolka, Niggli, p. 290.

[3] ATF 108 IV 76; ATF 130 II 302, 304; BSK-StPO-Thormann, Brechbühl, art. 246 N 3; Donatsch, Schwarzenegger, Wohlers, p. 215-216; Goldschmid, Maurer, Sollberger, Textausgabe-Lips-Amsler, p. 233; Message, CPP, p. 1220; Moreillon, Parein-Reymond, art. 246 N 1-3; Polizeiliche Ermittlung-Armbruster, p. 357; Schmid, Handbuch, p. 461; Schmid, Praxiskommentar, art. 246 N 1.

T449 – iii. La perquisition des documents électroniques

  • En ce qui concerne les fichiers, les emails et autres documents informatiques, les prescriptions des art. 269 ss CPP se rapportent uniquement aux données en voie de transmission[1].
  • A partir du moment où une donnée se trouve encore chez l’expéditeur, qu’elle est arrivée chez le destinataire ou qu’il s’agit d’un fichier enregistré sur un support de stockage qui n’est pas destiné à être envoyé, les dispositions relatives à la perquisition et au séquestre sont applicables (art. 241 ss et 263 ss CPP, en particulier art. 246-248 CPP)[2].
  • A noter qu’en ce qui concerne les données de localisation GPS, les historiques ou les données enregistrées sur un serveur sont également soumis aux dispositions sur la perquisition et le séquestre.
[1] ATF 140 IV 181, 187 = JdT 2015 IV 167, 172.

[2] ATF 140 IV 181, 187 = JdT 2015 IV 167, 172; Gless, p. 3 et 7; Jean-Richard-dit-Bressel, Mailbox, p. 159-160.