T438 – 3. Les conditions matérielles

  • L’autorité compétente pour ordonner une investigation secrète est exclusivement le ministère public (art. 286 al. 1 CPP).
  1. a) L’existence de soupçon de la commission d’une infraction énumérée à l’alinéa 2
  • Contrairement à ce qui prévalait sous l’aLFIS, l’investigation secrète ne peut être qu’une mesure réactive, ce qui exclut donc son utilisation de manière préventive[1]. En effet, l’art. 286 al. 1 let. a CPP exige l’existance de soupçons qui laissent présumer qu’une infraction énumérée à l’alinéa 2 a été commise.
  • La solution adoptée par le législateur de créer un catalogue d’infractions est cohérente avec ce qui prévaut pour la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication[2]. En revanche, le catalogue n’est pas identique, dès lors que l’investigation secrète n’est pas utile pour élucider un certain nombre d’infractions et qu’elle n’est admissible que pour des crimes ou délits graves, qualifiés ou poursuivis d’office[3].
  • Concernant la qualité des soupçons, l’art. 286 al. 1 let. a CPP ne prévoit pas de « graves soupçons » comme à l’art. 269 al. 1 let. a CPP. Au vu de l’intensité de l’atteinte aux droits fondamentaux et du catalogue plus restrictif des infractions concernées, de simples soupçons suffisent, ce qui permet d’ordonner l’investigation secrète à un stade plus précoce de la procédure[4]. A la lecture de l’art. 286 al. 1 let. a CPP, il reste néanmoins essentiel qu’une procédure pénale soit ouverte contre une personne déterminée, même si l’individu n’est pas encore identifié[5]. Cette exigence permet d’éviter la recherche de preuves au hasard, comme cela avait court sous l’empire de l’aLFIS[6].
  1. b) La justification de la mesure au regard de la gravité de l’infraction
  • En vertu de l’art. 286 al. 1 let. b CPP, une investigation secrète ne peut être mise en œuvre que si cette mesure se justifie au regard de la gravité de l’infraction.
  • Cette condition part du postulat que malgré l’édiction d’un catalogue d’infractions, il faut vérifier concrètement si la gravité conditionnant la mise en œuvre de l’investigation secrète est suffisante[7].
  1. c) La subsidiarité de la mesure
  • L’art. 286 al. 1 let. c CPP dispose qu’un autre acte d’instruction accompli jusqu’alors n’a pas abouti ou que les recherches sont sans issue ou excessivement difficiles sans le recours à l’investigation secrète.
  • La concrétisation du principe de subsidiarité figurant à l’art. 197 al. 1 let. c CPP s’appréhende de manière similaire à celle, notamment, de l’art. 269 al. 1 let. c CPP[8].
[1] BSK-StPO-Knodel, art. 286 N 16; CR-CPP-Jeanneret, Ryser, art. 286 N 31; Muggli, p. 255; Schmid, Praxiskommentar, art. 286 N 2.

[2] Goldschmid, Maurer, Sollberger, Textausgabe-Wolter, p. 278; StPO-Hansjakob, art. 286 N 9.

[3] BSK-StPO-Knodel, art. 286 N 23; CR-CPP-Jeanneret, Ryser, art. 286 N 9; Message, CPP, p. 1238; Schmid, Praxiskommentar, art. 286 N 6 ss.

[4] BSK-StPO-Knodel, art. 286 N 14; Polizeiliche Ermittlung-Rhyner, Stüssi, p. 509.

[5] Goldschmid, Maurer, Sollberger, Textausgabe-Wolter, p. 278; Message, CPP, p. 1238; Polizeiliche Ermittlung-Rhyner, Stüssi, p. 509.

[6] ATF 134 IV 266, 275-276 = JdT 2008 IV 35, 50-51; TF 6B_211/2009 du 22 juin 2009, c. 1.2; BSK-StPO-Knodel, art. 286 N 16; Message, CPP, p. 1238.

[7] BSK-StPO-Knodel, art. 286 N 20; Pieth, p. 152.

[8] Supra Partie II, Chapitre 3, I, A, 2, c, ii, a), 3, n° 1154 ss.

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