T122 – III B. L’appréciation du rapport d’expertise

1. La direction de la procédure connaît le droit

  • En vertu du principe iura novit curia, la direction de la procédure connaît le droit et n’est donc pas tenue à l’argumentation juridique des parties. L’expertise, considérée comme un moyen de preuve, sert à établir uniquement les faits. Néanmoins, il est parfois délicat de distinguer le fait du droit.
  • Pour illustrer la problématique, prenons le cas d’un dommage à la propriété causé par une personne atteinte d’une maladie mentale. Le juge demande à un expert médical d’évaluer l’incapacité de l’auteur pour déterminer s’il s’agit d’un cas d’irresponsabilité (19 al. 1 CP) ou de responsabilité restreinte (art. 19 al. 2 CP). L’évaluation doit se baser uniquement sur un élément de fait et de manière abstraite, afin de déterminer si l’auteur est faible d’esprit ou est atteint d’un trouble mental grave.
  • Le tribunal doit s’assurer que la question qui est posée à l’expert se limite à l’état de fait et n’est pas sujette à une réponse sur le droit, à savoir si l’auteur est en état d’irresponsabilité ou de responsabilité restreinte. Il est néanmoins possible que le juge pose clairement une question de fait et que l’expert fournisse une réponse avec un avis juridique. Dans une telle hypothèse, le magistrat doit se limiter à apprécier l’état de fait établi ou prouvé par l’expertise.
  • Il est impératif que le juge ne se décharge pas de sa mission en administrant une preuve et en ratifiant l’avis juridique de l’expert sans l’apprécier[1]. Ce constat vaut de même lorsque le ministère public recourt à une expertise. Selon le principe iura novit curia, la direction de la procédure doit donc éviter de poser des questions demandant une réponse juridique et/ou de tenir compte de l’avis juridique de l’expert. Elle doit s’en tenir à l’établissement des faits par l’expertise comme moyen de preuve et apprécier ce qui est démontré.

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