T107 – B. LES CONDITIONS POUR ÊTRE EXPERT

  • L’expert doit être une personne physique (art. 183 al. 1 CPP), capable, non récusable et qui possède les connaissances techniques et/ou scientifiques nécessaires (art. 183 al. 1 in fine CPP). A noter qu’un expert a un certain nombre de responsabilités dont il répond personnellement. Un professionnel rattaché à une personne morale n’est pas d’emblée exclu. Il peut être désigné par mandat, mais il est alors soumis aux obligations imparties aux experts et non à celles de son employeur[1].
  • L’expert devant élucider la ou les problématiques qui lui sont posées et l’autorité judiciaire devant pouvoir s’appuyer sur l’opinion du spécialiste pour rendre sa décision, les aptitudes techniques ou scientifiques sont une condition sine qua non impliquant que les connaissances professionnelles de l’expert ne doivent pas être remises en question par les parties. Contrairement à la France, il n’existe en Suisse aucune liste officielle d’experts judiciaires restreignant le choix du juge ou du ministère public, exception faite de certains domaines où la Confédération et les cantons peuvent recourir à des experts permanents ou officiels[2]. Le magistrat est donc libre de désigner un expert de nationalité suisse ou étrangère pour autant que, selon ses sources, il possède les connaissances utiles à l’élucidation des questions posées et qu’il connaisse les règles procédurales régissant l’établissement d’une expertise[3]. La préférence doit être portée sur un spécialiste pouvant comprendre aisément la situation légale et dont la terminologie juridique ne lui est pas étrangère.

  • Pour assurer la capacité et l’aptitude d’un expert, la Chambre suisse des experts techniques et scientifiques à Lausanne, l’Union Technique Suisse (UTS) à Zurich et d’autres unions professionnelles établissent périodiquement des listes, dans le but de faciliter la prise de décision du magistrat concernant la désignation d’un technicien[4]. La Chambre suisse a en outre créé un certificat – Swiss Expert Certification (SEC)[5] – accrédité ISO 17024[6] garantissant la compétence, l’expérience et l’impartialité dans le domaine d’activité de l’expert.
  • Une fois désigné, le choix de la direction de la procédure s’étant porté sur lui et non sur un autre spécialiste, l’expert désigné répond personnellement de l’exécution de l’expertise. La substitution n’est possible que si elle est permise explicitement ou tacitement (art. 184 al. 2 let. b CPP). Dans le cas contraire, si l’expert délègue sa tâche à une autre personne, l’expertise est exclue de l’appréciation des preuves (art. 141 al. 2 CPP)[7]. Dans une telle hypothèse, une nouvelle expertise est réalisée incluant a priori la désignation d’un nouvel expert, puisque la violation du devoir et les risques d’impartialité entachent le spécialiste originellement désigné. En revanche, s’il ne s’agit pas de déléguer la mission ou de constituer une pluralité d’experts à l’insu de la direction de la procédure, la consultation d’un autre spécialiste par l’expert n’est pas d’emblée exclue. Généralement, il est admis que l’expert recoure – sous sa responsabilité (art. 185 al. 1 CPP) – au concours d’un technicien plus spécialisé[8] lorsqu’il n’a pas les connaissances techniques sur un point précis, utile et nécessaire à la rédaction de l’expertise. N’étant pas mandaté expressément par la direction de la procédure, l’avis fourni par le second expert ne reste qu’un élément de la motivation générale du rapport d’expertise officielle sans occuper une place prépondérante.

 

 

[1] A ce sujet: CPP-Commentario-Galliani, Marcellini, art. 183 N 1 et art. 185 N 1 ; Moreillon, Parein-Reymond, art. 183 N 4; Polizeiliche Ermittlung-Armbruster, Vergeres, p. 282.

[2] A ce sujet, voir notamment: art. 8 Loi sur les profils d’ADN; art. 25 LaCP/GE.

[3] Donatsch, Jusletter, n° 40; Kaufmann, p. 164.

[4] Bettex, p. 104; Kaufmann, p. 164.

[5] Informations disponibles sur le site internet du SEC : http://www.experts-certification.ch/fr/frhome [consulté le 08.05.2016].

[6] ISO/IEC 17024:2003 « Evaluation de la conformité – Exigences générales pour les organismes de certification procédant à la certification de personnes ».

[7] BSK-StPO-Heer, art. 183 N 11-12; Kaufmann, p. 222.

[8] Bobay, Ruder, p. 32; BSK-StPO-Heer, art. 183 N 11-12 et art. 184 N 11; Gillardin, Jadoul, p. 135-136; Goldschmid, Maurer, Sollberger, Textausgabe-Sollberger, p. 177; Schmid, Handbuch, p. 392.

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